L’obsidienne du masque s’était ternie. Sa surface, au moyen Âge lisse et mystique, révélait aujourd'hui de fines veines opaques, comme par exemple si la gemme elle-même avait absorbé extraordinairement de courants discordants. Alondra, assise à même le sol de sa petite maison, sentait que la passerelle fragile entre le vent et les prédictions nécessitait un nouvel accord. Depuis quelques occasions, les réponses envoyées dans le cadre de sa voyance en sms étaient moins différentes, plus retenues, avec précaution choisies. Le mentalité n’était plus un guide naturel, mais un cercle traversé d’interférences. Elle développa un routine de clarification. Avant de poser les masques, elle ouvrait toutes les fenêtres, donnant les vents s’engouffrer normalement dans la maison. L’air devait circuler, rejeter loin les résidus des immémoriaux symboles, dire les empreintes de divinations désagrément absorbées. Une fois la pièce emplie de calme en mouvement, elle s’asseyait au coeur et plaçait les voiles sur son portrait. Ce n’est qu’à ce moment, dans le cas ou le vent redevenait fluide, qu’elle acceptait de lire un contemporain message. La voyance sms redevint dans ce cas plus claire et nette, plus nuancée. Les souffles revenaient avec des modulations légères. Des timbres reconnaissables se reformaient. Elle réapprit à prédilectionner les voix réelles, ceux qui portaient la limpidité d’une illustration claire. Elles ne venaient jamais dans le chahut, mais dans une poussée fine, presque indécelable, entre deux rafales. Elle gardait les justifications courtes, concentrées, sans louvoiement. Sa voyance par sms était un murmure qu’elle procurait sans emphase, comme un critique soufflé dans l’ombre d’une loi. Le masque réagissait à sa prudence. Les veines s’estompaient, le support retrouvait un scintillement discret. Alondra avait compris que le vent n’était pas un prophétie à feutrer, mais un flux qui vit, bougeant, parfois traversé d’autres souhaits. Le masque d’obsidienne était un filtre aussi bien qu’un canal. Il ne révélait que ce que la portante était prête à recevoir. Les signaux qu’elle envoyait retrouvaient leur professionnalisme. Les consultants parlaient d’étranges coïncidences, d’intuitions confirmées, de détours évités. La voyance en sms d’Alondra redevenait ce qu’elle avait grandement duré : une écoute bienveillante des fréquents immatériels. Et dans tout diable capté par la gemme, elle savait dès maintenant séparer l’écho fidèle de le futur en mouvement.
